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Capitolo 6

Attention ce chapitre contient des scènes à caractère sexuel. Les scènes suivantes sont hétérosexuelles.

      Cristiano semblait de mauvaise humeur. Cela ne choquait personne, puisque c’était son expression habituelle, et de toute façon nul ne se serait risqué à le lui faire remarquer. Sauf peut-être son frère qui lui demanderait éventuellement s’il avait avalé un cirque vu la tronche qu’il tirait. Mais aujourd’hui était le jour de chance de Cris, puisqu’il était presque seul dans la maison familiale. Son abruti de frère avait découché avec il ne savait quelle catin, ses plus ou moins sœurs étaient à l’école et son père faisait des affaires avec son grand père. De plus, aujourd’hui il avait quartier libre et il savait très bien comment il allait en profiter. Cela faisait longtemps. Trop longtemps et ça lui avait énormément manqué, mais il tenait à profiter de sa matinée en toute tranquillité et sans précipitation. Il se leva donc, et se permit de passer plus de temps dans la douche que d’ordinaire, histoire de délasser les tensions qui l’habitaient à peu près constamment.

 

           La mousse glissa sur son corps, musclé mais encore trop fin à son goût. Il était loin d’être un gringalet mais ne serait jamais taillé en V comme certains du métier. Cette constatation le faisait rager, pensant perdre de la crédibilité en étant ainsi bâti. Ce qui était bien évidemment faux. Daniele, quand il était dans le plus simple des apparats, ressemblait sensiblement à son fils avec quelques années de plus. La morphologie était la même, qui plus est Cristiano s’estimait heureux que son frère soit pire que lui. Au moins un sujet sur lequel il pouvait largement se moquer, en plus de son vertige et de son habitude à tout prendre à la légère alors que cela salissait l’image de la Famille. Il existait finalement beaucoup de sujets pour emmerder son petit frère. Mais le problème, c’était que l’inverse était tout aussi vrai. Le désavantage d’être finalement aussi proches en se détestant : on en savait énormément sur l’autre, et réciproquement. De ce fait, ni l’un ni l’autre n’arrivait à prendre l’avantage et la guerre ne pouvait ainsi pas être remportée une bonne fois pour toutes.

 

          Valente était supérieur à Cristiano en matière de tir. Si l’ainé de la famille se débrouillait de façon très honorable, son petit frère le surpassait. Il ne manquait jamais sa cible. De près, de loin, de côté, de nuit, jamais. Valente était un virtuose de l’arme à feu petit calibre et c’était pour cela qu’il était envoyé dans certaines missions périlleuses. Cette responsabilité lui permettait d’être reconnu comme membre indispensable de la Famille, et comme digne frère de Cristiano. Il n’avait cependant pas grand-chose d’autre à se soucier, à part la gérance de son casino. C’était à lui qu’on demandait de régler les conflits qui nécessitaient une provision en arme, et le reste du temps personne ne lui demandait rien, Valente pouvant ainsi se prélasser dans son petit univers rempli de cartes de jeu. Ce qui n’était pas le cas de Cristiano.

 

           Néanmoins, si Valente avait de bonnes compétences de gestion dues à son casino, son frère le surpassait, comme pour tout hormis la précision de tir. Il savait tenir un journal comptable, négocier, tirer, se battre, se défendre, torturer ou trouver les failles en un rien de temps. Cristiano était polyvalent, ce qui était indispensable pour un futur chef de famille de cette envergure. Il savait prendre des décisions importantes, marcher sur des œufs et diriger des hommes. Tant de connaissances, de facultés et de réussite, c’était presque trop, presque impossible pour un seul homme. Car à côté de tout ce savoir ingurgité, compris, assimilé et utilisé, Cristiano ne pouvait pas se vanter d’avoir grand-chose. Cela lui suffisait pourtant, il n’avait pas besoin de beaucoup plus que de mettre son frère hors de lui et d’avoir une personne importante à ses yeux. Il se réalisait dans son travail. Du moins, c’était ce dont il se persuadait, car d’un point de vue extérieur, il avait l’air aussi heureux que quelqu’un allant à l’enterrement de ses propres parents.

 

           Sous toute la force et la prestance que Cristiano se donnait, le mafieux n’en demeurait pas moins fragile. Cette faiblesse était tellement étouffée par sa quête d’être irréprochable dans son travail qu’elle était invisible pour tous. Mais il l’était, sans aucun doute. Il ne l’avouerait jamais, ne s’en rendait peut-être même pas compte, mais Cristiano n’était pas un roc immuable comme son père et son grand père. Cristiano avait des failles et elles menaçaient d’apparaitre au grand jour à chaque instant, car il y aurait forcément un moment où il ne pourrait plus tenir ce visage indifférent et froid.

 

           Cris finit par couper l’eau de la douche, y étant déjà resté plus qu’à l’ordinaire. Il sortit et s’enveloppa dans une immense serviette bordeaux, laissant ses cheveux goutter le long de ses épaules. Quotidiennement, ses préparatifs matinaux étaient expéditifs, mais aujourd’hui il prenait son temps. S’habiller avec soin, une belle chemise rouge pour faire honneur à l’endroit où il comptait se rendre, avec une veste noire et un pantalon assorti. Il sécha rapidement ses cheveux avec la serviette et se rasa sans oublier l’après rasage parfumé. Enfin satisfait, l’ainé des Genovese descendit dans la cuisine pour se faire réchauffer du café dans une jolie tasse blanche venant de sa grand-mère. Il s’autorisa à y ajouter un nuage de lait, ce qu’il ne faisait jamais en public, et ouvrit le journal en s’installant à table. Une fois encore, il avait rarement l’occasion de prendre le temps, pourtant il appréciait le silence du matin et les petits déjeuners dans le calme. Débarrassé du chahut provoqué par l’agitation de toutes les générations de la Famille, Cristiano plongea la brioche qu’il venait juste de beurrer dans son café et profita de la sensation moelleuse tout en lisant les gros titres.

 

        Si s’intéresser à l’actualité était indispensable dans le travail de Cristiano, celui-ci aimait particulièrement se tenir au courant de ce qui se passait dans le monde et dans sa ville. Des phénomènes inexpliqués en Asie faisaient la une aujourd’hui. Le mafieux prit une gorgée de café en haussant légèrement un sourcil. Certainement des pactisants, ou des stellas, ou les deux. Le monde ne pourrait bientôt plus cacher ces informations aux yeux de tous, provoquant le chaos ou bien le début d’une nouvelle ère, d’un nouveau règne sanglant. Ou peut-être que rien ne se passerait et que tout le monde pourrait cohabiter tant bien que mal. Dans tous les cas, cela ne lui faisait ni chaud ni froid. En temps de guerre, la mafia était reine ; en temps de paix, elle s’efforçait de rendre la situation intenable pour que cela serve ses intérêts. Cela avait toujours fonctionné comme cela, et cela perdurerait tant que les mafias existeraient. Cristiano s’autorisa à savourer une autre bouchée de sa brioche en terminant son café, ses yeux glissant sur les lignes d’informations imprimées. Jusqu’à arriver à la rubrique mortuaire. Il y avait au moins deux trois personnes qu’il avait ordonné d’exécuter la veille. Cela avait été fait, c’était parfait. Il replia le journal, le reposa sur la table et se débarrassa de sa tasse dans l’évier avant de quitter la maison avec ses clés, son portefeuille et bien sûr son arme. Il décida de marcher un peu pour profiter du soleil matinal qui augurait décidément un bon début de journée.

 

           Milan était occupé, Milan était pressé, et Cris se baladait dans ces rues qu’il connaissait par cœur, si tranquillement qu’il paraissait décalé. Et pourtant, il avait toujours cette même prestance qu’il avait dû peaufiner, puisqu’il en était dépourvu dans ses jeunes années. A présent, il arrivait à attirer les regards et à faire chuchoter sur son passage, le regard fier et droit fixé sur son objectif. Il n’était que rarement importuné et quand cela arrivait, au vu de son statut évident de bourgeois, on comprenait bien vite que ce n’était pas quelque chose à recommencer. Et dans ceux qui reconnaissaient Cristiano en tant qu’héritier des Genovese, personne n’était assez stupide pour déclencher une guerre de clan ou mourir dans d’atroces souffrances en lui parlant de travers. Alors le mafieux avait la paix et c’était tout ce qu’il demandait. Etre tranquille.

 

           Il finit par arriver face à une devanture qui ne payait pas de mine, assez discrète avec une enseigne tout aussi fine, indiquant le nom Love’s Out. Joli sous-entendu pour préciser que l’amour devait rester sur le pas de la porte en ce qui concernait ce bar un peu particulier. D’ailleurs, un jeune homme à l’air complètement épuisé et perdu était adossé au mur en fumant une cigarette dans l’espoir de se réveiller. Il s’appelait Elio et travaillait en tant que serveur dans le bar. Elio n’aimait pas Cris et ce dernier le lui rendait bien.

 

« Déjà debout ? Ça ne te ressemble pas, railla-t-il.

    - Toi ça ne te ressemble pas de passer tout court. » lui répondit Elio avec un peu de colère dans sa voix éteinte.

 

« Désolé de t’avoir manqué à ce point mais je ne suis pas ici pour toi.

    - Encore heureux. Laisse tomber, elle n’est pas là.

    - Tu m’en diras des nouvelles. »

 

Au moment où il allait entrer malgré tout, une jeune femme d’une vingtaine d’année, aux longs cheveux blonds sortit en trombe du bar et le percuta. Elle redressa la tête et lui adressa le plus beau des sourires en s’excusant de sa maladresse. Ce qui ne fit ni chaud ni froid à Cristiano, qui se contenta de la repousser sur le côté alors qu’elle se jetait dans les bras du serveur.

 

« Elioooooo ! »

 

           Le mafieux lui jeta un sourire moqueur, comprenant ce qui l’avait tiré du lit de bon matin tandis que celui-ci lui répondait d’un regard noir et menaçant dont il saisissait très bien la signification, sans même qu’il ait besoin de parler. Il poussa finalement la porte et arriva dans une salle à l’ambiance tamisée et aux sièges en velours. Il se racla la gorge en posant sa veste sur le dossier d’une chaise de bar et attendit. A peine quelques secondes à vrai dire car elle ne laissait personne venir la déranger pendant la journée.

 

« Nous sommes fermés ! »

 

        Son air courroucé se transforma immédiatement en voyant à qui elle avait à faire, et elle esquissa un sourire avant de prendre un air réprobateur.

 

« Ça vaut pour toi aussi !

    - Moi aussi je suis heureux de te voir Delia. Tu m’as diablement manqué… »

 

           Cristiano s’approcha d’elle pour la prendre par ses hanches pulpeuses et venir attraper ses lèvres entre les siennes pour l’embrasser longuement, sa main glissant dans sa longue chevelure composée de boucles rousses épaisses et bien ordonnées.

 

« Mmm tu avais pourtant bien mieux à faire.

    - J’ai eu beaucoup de travail ces temps-ci mais aujourd’hui je suis là pour toi. »

 

           Il l’embrassa encore et encore jusqu’à ce qu’elle se déride et consente à lui faire un sourire.

 

« Tu as l’air d’aller bien, alors ne me dis pas que tu n’as jamais le temps pour venir.

     - Je préfère toujours avoir l’air présentable pour venir te voir tu le sais… »

 

           C’était vrai. En présence de Delia, Cristiano se métamorphosait. Il se mettait à sourire, à être prévenant et attentionné. Ses yeux reflétaient enfin quelque chose et il ressemblait enfin à un être humain avec des sentiments. Elle était la seule à pouvoir le voir ainsi.

 

           La belle tenancière et propriétaire du bar prit un air assez supérieur avant de passer derrière le comptoir, ses cheveux battant la mesure dans son dos et son jupon virevoltant. Le mafieux ne se pria pas pour regarder avec insistance le décolleté plongeant qu’elle lui offrit enfin, avant de remonter sur son cou gracile et blanc, ses lèvres rouges au maquillage un peu effacé par ses baisers. Ses pommettes, ses yeux verts et intelligents et ses cheveux, reconnaissables entre mille, lui permettant d’attirer dans son antre moult âmes perdues. Delia était une femme dangereuse. Elle jouait de ses formes comme les mafieux de leurs armes. Et pourtant elle avait accepté de baisser la garde devant lui, un peu en tout cas. Cristiano ne cherchait pas à savoir s’il était amoureux ou non, il n’avait guère le temps pour une telle promesse, étant trop obnubilé par son travail, mais il l’appréciait énormément. Et elle comptait, de plus en plus.

 

« Alors, je te sers quoi ?

    - Fais-moi la surprise, je n’attends que ça. »

 

           Elle lui sourit et entama une danse hypnotisante entre les différentes bouteilles qui passaient entre ses mains, jusqu’à donner naissance à un verre d’une belle couleur orangée qu’elle lui tendit. Il la remercia avant d’y tremper ses lèvres et de boire rapidement plusieurs gorgées.

 

« C’est très bon mais ça, je sais que tu le sais.

    - En effet. »

 

           Et ce n’était pas de la vantardise mais une certitude, une connaissance en ses qualités pour accommoder les cocktails aux gens aussi bien que Cristiano était doué pour négocier une affaire. C’était son travail, elle le faisait bien.

 

           Le silence se fit entre eux deux alors qu’ils se cherchaient du regard, se souriaient vaguement, s’évitaient pour finalement revenir. Cristiano finit par sortir un petit paquet de sa poche pour lui tendre.

 

« Pour t’avoir trop fait attendre. »

 

          La belle rousse attrapa le présent et le déballa pour en sortir une chaine en argent très finement travaillée. Ses yeux étincelèrent même si l’espace d’un instant, la lueur en fut presque triste, ce qui échappa pourtant à l’œil aiguisé de son amant. Elle lui tendit délicatement son poignet et Cristiano lui attacha doucement avant de finir son verre et de prendre la main de la tenancière.

 

« Sérieusement Delia, tu m’as manqué. »

 

           Il se leva et sans lâcher sa main fit le tour du bar pour la rejoindre et reprendre ses lèvres, ses mains commençant cette fois ses caresses le long de ses formes plantureuses. Passant sur sa poitrine, sa taille, ses hanches, alors que ses lèvres faisaient disparaitre les derniers restes de son maquillage. L’envie de Cristiano commença à prendre forme et ses mains à relever les multiples couches de tissus qui constituaient la robe de la jolie tenancière.

 

« Tu en fais toujours trop… » Sa voix était un peu plus rauque à cause du désir et de la retenue.

 

« C’est pour te voir peiner à obtenir ce que tu souhaites… »

 

           Sa voix aussi était plus tendue et ses yeux plus brillants. Elle ne l’avait pas dit, mais Cristiano lui avait aussi beaucoup manqué. Sa main passa dans ses cheveux châtains, sur sa joue et elle ouvrit la bouche alors que le ballet de leurs langues commençait. Cristiano atteignit enfin les cuisses de sa belle, se mit à les caresser et glissa ses mains entre elles pour effleurer, titiller, jouer doucement du bout des doigts, provoquant des frissons et des légers gémissements d’envie dans la bouche de la jeune femme. La main de Cristiano lui attrapa la taille et la hissa sur le bar après l’avoir débarrassé des bouteilles et des verres. Il lui embrassa les lèvres une dernière fois avant de se baisser pour passer la tête sous sa robe, à la recherche de ce qui l’intéressait. Il n’eut pas de mal à trouver la cible de son intérêt. Souriant, il commença par y passer doucement la langue, caressant ses cuisses en même temps, regrettant que la masse de tissu l’empêche de voir son visage, mais se disant que s’il arrivait à l’entendre malgré tout, ce serait un gage de qualité.

 

           Après avoir passé sa langue lentement le long de ses lèvres intimes, il l’enfonça en elle et se mit à la faire bouger, caressant toujours ses cuisses. Il ferma les yeux et écouta sa respiration, ses gémissements étouffés, puis sentit ses jambes trembler un peu, ses muscles se contracter autour de sa langue. Il vint titiller le centre de son plaisir et son propre entrejambe commença à être à l’étroit alors que les marques de plaisir de Delia se faisaient plus fortes… Sa langue insista encore et encore jusqu’à ce que les tremblements se fassent irrépressibles et qu’il la sente jouir. Sa langue se fit plus tendre quelques secondes avant qu’il ne remonte et ne vienne embrasser le coin de ses lèvres. Le souffle de Delia était court et ses joues étaient rouges, mais elle lui sourit tendrement et vint l’embrasser sur les lèvres. Il n’y avait pas à dire… Cris était de ceux qui savaient le mieux jouer de leur langue.

 

           Les mains du mafieux se firent de plus en plus pressantes et il ouvrit son pantalon pour le baisser un peu, ainsi que son sous-vêtement, pour révéler sa virilité dressée et désireuse. Delia sourit et remonta sa robe d’elle-même. Cris l’attrapa par les hanches et la jeune femme noua ses bras autour de son cou alors qu’il commençait à venir en elle, grognant un peu de plaisir enfin soulagé. Il la maintint contre lui et une fois tout au fond d’elle, il se retira un peu pour commencer ses vas et viens, leur faisant partager un moment n’appartenant qu’à eux seuls. La main de Cris descendit dans le bas de son dos, la plaquant de plus belle contre lui, les faisant gémir à l’unisson alors qu’il accélérait petit à petit ses mouvements, le plaisir montant en lui de façon irrépressible.

 

           Ses gestes devinrent désordonnés et son regard se voila un peu tandis qu’il l’embrassait sur la bouche, dans le cou, le décolleté à moitié défait, partout. Cette femme… Cette femme c’était vraiment quelque chose. Il fit cependant attention à voir si son désir et son envie suivaient les siens et quand il remarqua que c’était le cas, quelques derniers mouvements lui suffirent à jouir en elle, son corps se tendant brusquement, serrant le corps de la belle rousse contre lui. Celle-ci ne tarda pas par la suite à vivre un deuxième orgasme qui se perdit dans les lèvres de Cristiano. Les souffles étaient épars dans le bar et leur peau ne voulaient pas se lâcher… Cristiano se retira doucement s’essuya et se rhabilla avant de la reprendre dans ses bras.

 

« Si c’est pour avoir ça à chaque fois que je viens… »

 

           Le regard de Delia se fit immensément triste soudainement mais cela échappa encore une fois au mafieux.

 

« Oui ? Tu ferais quoi ?

    - Et bien je ferais mon possible pour venir plus souvent.

    - Ce serait bien. D’ailleurs Cris… Comment tu vois notre avenir à tous les deux ? »

 

           Ce fut le ton de Delia plus que sa phrase qui fit réagir Cristiano. Il la regarda, sans vraiment comprendre.

 

« Notre avenir ? Comme notre présent, qu’est-ce que tu attends de plus ? »

 

           L’expression de la tenancière s’attrista de plus belle et sa main caressa la joue de son amant du bout des doigts.

 

« Quelque chose que tu ne sembles pas en mesure de me donner…

    - Mais ? Delia, explique-moi. Qu’est-ce qui se passe, à quoi tu penses ?

    - Je suis désolée Cris… Mais ça ne peut plus durer entre nous.

    - Pardon ? » fit-il d’une voix étranglée.

 

« Je sais que tu fais des efforts, que tu essaies, mais le futur que tu vois n’est pas celui que je cherche… Pas du tout. Ce n’est même pas un futur. Tout se passe bien entre nous, quand on se voit, que tu passes. Mais au final on stagne, on n’avance pas tous les deux tu le vois bien. Et moi je veux autre chose, je veux de la stabilité. Bon Dieu Cris ! Tu ne me l’as jamais dit ! Ca fait quoi, un an ? Et tu ne m’as jamais dit que tu m’aimais ! Et je suis condamnée à attendre patiemment tes visites, à espérer que tu viennes. Je passe après tout le reste ! »

           Le visage du mafieux commença à se décomposer. Mais… Que disait-elle ? Pourquoi comme ça soudainement ? C’était vrai qu’il ne l’avait pas dit mais… Cristiano ne s’attachait guère aux gens, avec elle c’était pourtant différent, il l’appréciait et… Il voulait la garder près de lui malgré son boulot… Comment pouvait-elle lui dire ça ? Il pensait pourtant être suffisamment…

 

« Ecoute Delia, je vais changer pour ça, je n’avais pas réalisé et…

    - Justement… Tu n’avais pas réalisé. Et ce n’est pas en te forçant que ça marchera mieux tu le sais. En tout cas moi je le sais. Je ne te demande pas d’aller à l’encontre de ce que tu es… Je dis juste qu’il vaut mieux que ça se termine entre nous maintenant… Pour aller de l’avant. Je ne peux pas continuer à t’attendre toute ma vie.

    - Mais… »

 

           C’est avec toi que j’ai envie d’aller de l’avant ! C’était ce qu’il avait envie de lui dire, de lui hurler ! Et pourtant il ne pouvait pas. Car le prometteur héritier de la famille Genovese était finalement victime de ses faiblesses. Cristiano ne faisait pas confiance, Cristiano avait du mal à s’attacher, Cristiano commandait très bien, était très doué mais jamais il ne laissait quiconque venir lire dans son cœur et s’y installer. Jamais. Et c’était toujours quand il était trop tard qu’il s’en rendait compte. Ce je t’aime, combien de temps l’avait-elle attendu, espéré ? Elle attendait sûrement encore plus ! Une promesse, une demande… Ces pensées qui n’avaient jamais effleuré l’esprit du mafieux.

 

« Laisse-moi une chance… »

 

           Les yeux de Delia brillaient de nouveau, mais ce n’était pas de plaisir cette fois. Cette chance, elle lui avait de trop nombreuses fois accordée.

 

« C’est fini Cris. »

 

           La tête haute mais le regard éteint et fragile, le jeune italien attrapa sa veste et se dirigea vers la sortie, sans vouloir s’infliger la vision de la femme si belle qu’il venait de perdre. A jamais. Que pouvait-il dire ? Elle avait raison. Et la couvrir de mots d’amour et de cadeaux ne suffirait pas. Car il finirait par de nouveau ne plus y penser. Il était égoïste et malgré tout ce qu’il pouvait éprouver pour elle, il n’avait jamais su le matérialiser en preuves et en mots. Et c’était bien là sa plus grande faiblesse. A quoi bon lui courir après et tenter de regagner son cœur ? Elle l’avait déjà cerné, elle savait qu’il ne pourrait pas changer, du moins pas pour elle. Delia n’était pas celle qui arriverait à le faire bouger de ses positions, à ouvrir son cœur qui s’emprisonnait lui-même. Personne ne le pouvait.

 

           La plus grande de ses faiblesses. Il y avait pourtant cru. Dès qu’il pensait à Delia c’était avec le sourire, il avait envie de la voir, de discuter avec elle, de l’embrasser sur l’oreiller, de lui parler, de partager. Chaque moment avec elle était très précieux pour lui. Et pourtant, il avait été incapable de lui ouvrir totalement son cœur, de lui proposer plus. Il aurait dû se douter que c’était ce qu’elle attendait mais il en avait été incapable. Et il l’avait perdue de la façon la plus stupide qui soit. Il avait mal et pourtant une fois de plus son visage ne reflétait rien. Plus de sourire, plus de partage. Plus de Delia. Il était à nouveau seul avec lui-même. Là au moins il n’avait pas de problème. Et tant qu’il faisait bien son travail il ne décevrait pas à nouveau. Il n’y avait que là où tout fonctionnait comme il le voulait.

 

           Soudain, cette belle journée semblait maussade, et il sentit son cœur se serrer au point de lui faire mal. Cela faisait longtemps, et maintenant la tristesse montait en lui à chacun de ses pas quand il songeait qu’à présent, il n’aurait plus Delia dans un coin de sa tête. Il ne se demanderait plus quand serait la prochaine fois qu’il la verrait et comment la surprendre, la faire rire, la faire sourire. Il n’avait plus rien, à nouveau. Heureusement qu’il ne s’était pas plus investi au final, sinon cela lui aurait fait encore plus de peine.

 

           Mais il fallait être honnête. Cristiano avait horriblement mal à cet instant précis. Il ne pouvait pas le montrer, pas le dire, pas l’expliquer, pas se plaindre. Alors il l’ignorait, en se disant que c’était bien dommage car c’était des bons moments qu’il avait passé avec Delia. Mais il refusait de se laisser aller à une véritable tristesse, qui pourtant lui enserrait le cœur. La pire des faiblesses de Cristiano. Etre seul et être persuadé que c’était l’état qui lui correspondait le mieux. Que c’était normal qu’il le soit et anormal quand cela changeait. Son histoire avec Delia n’avait que trop duré, et c’était solitaire qu’il se sentait lui-même. Cristiano était mieux seul, il le savait depuis longtemps.

 

           Le mafieux dégaina son téléphone et passa des coups de fil jusqu’à se donner une montagne de boulot et de choses à faire. Après ça irait mieux… Peut-être. Au moins ça lui éviterait de penser à ce fiasco. Adieu Delia. Il lui souhaitait du bonheur, puisque qu’avec lui elle ne l’avait pas trouvé.

 

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